Lady Dior : la fabrication d'une icône du design
Un rare aperçu de la maroquinerie florentine de Dior
En 1994, l'équipe de la maison Dior choisit son chouchou. Terme d'affection français mieux traduit par « favori », chouchou était également le nom d'un nouveau sac Dior dévoilé cette année-là. Lors de la conception du sac, l'équipe s'est inspirée de la biographie de Christian Dior. Les détails et les ajustements de conception révèlent des aspects des nombreuses superstitions et prédilections de Dior en matière de conception. Un ensemble de quatre lettres en métal épelle le célèbre nom de la maison en clin d'œil aux charmes talismaniques (une étoile d'or et un brin de muguet parmi eux) que Monsieur portait dans ses poches ; les matériaux, dont le cuir Nappa, sont surpiqués pour réaliser le matelassage emblématique du motif Cannage de la marque, sa forme un hommage aux chaises Napoléon III que Dior a alignées pour accueillir les invités lors de ses présentations haute couture.
Depuis qu'il a fait lire ses paumes par une diseuse de bonne aventure à 14 ans, Christian Dior a cru au destin, au destin et aux signes ; Dans une tournure de conte de fées, le chouchou de Dior est devenu le favori d'une princesse en visite. En atterrissant à Paris en 1995 pour visiter l'exposition d'œuvres d'art de Cézanne au Grand Palais, la princesse Diana de Galles s'est vue remettre le sac de Bernadette Chirac, alors Première Dame de France. Coup de foudre : à son retour à Londres, la princesse commande plusieurs versions de l'accessoire ; un an plus tard, il est rebaptisé Lady Dior.
Le Lady Dior a depuis rejoint le canon des créations emblématiques de la maison. Sa forme architecturale, son duo de poignées supérieures arrondies et ses détails en métal sont aussi reconnaissables 'Dior' que le motif répété du logo Oblique de la marque - initialement rédigé en 1967 par son directeur créatif de l'époque, Marc Bohan - ou la veste Bar ajustée, dont la taille à basque a changé. le cours de l'histoire de la mode dans le cadre de la collection phare New Look de Christian Dior en 1947. J'aime les sacs, j'aime les accessoires, déclare Maria Grazia Chiuri, la toute première femme directrice artistique de Dior. Je pense qu'ils définissent le look. Ils font signe.
Depuis qu'elle a rejoint la marque, la créatrice italienne a créé une myriade de versions du Lady Dior pour refléter ses collections saisonnières de prêt-à-porter. Ce printemps, Chiuri a fait des recherches sur la sœur de Dior, Catherine. Combattante de la résistance de la Seconde Guerre mondiale en tant que membre des services secrets polonais en poste en France, Catherine a survécu au camp de concentration pour femmes de Ravensbrück et est devenue une célèbre botaniste et jardinière. L'hommage de Chiuri à Catherine Dior comprend un sac Lady Dior en cuir de veau, dont l'extérieur pâle est imprimé et brodé du motif Jardin Naturel de fleurs sauvages, de chardons et d'herbes.
Des artistes contemporains ont également déjà conçu des sacs Lady Dior. Il y a eu des versions de la photographe américaine Nan Goldin, de la créatrice suisse Olympia Scarry et de la sculptrice britannique Kate MccGwire - toutes trois ont participé à l'exposition itinérante de 80 pièces Lady Dior As Seen By, qui s'est arrêtée à Séoul, Milan et Hong Kong - et par Marc Quinn. L'artiste britannique, qui a peint certaines de ses Lady Diors avec des prises macro d'orchidées, a rejoint ses collègues YBA Mat Collishaw et Ian Davenport comme l'un des 11 noms de premier ordre mandatés pour participer à l'initiative inaugurale Lady Dior Art.
Depuis son lancement en 2016, Lady Dior Art a donné carte blanche à une liste de talents internationaux qui comprend le peintre de Manhattan Spencer Sweeney et Friedrich Kunath ; dans son atelier de Los Angeles, l'artiste allemand a ajouté un coucher de soleil doré à sa Lady Dior. La troisième édition de Lady Dior Art - qui s'est concentrée sur un groupe de créatrices entièrement féminin - a vu Burçak Bingöl confectionner une Lady Dior en fausse fourrure de soie blanche duveteuse, qui a ensuite été brodée à la main de fleurs acryliques bleu émeraude.
Un équilibre entre liberté artistique et probabilité artisanale est au cœur de Lady Dior Art. Les créations des artistes sont transformées d'esquisses en sacs en trois dimensions dans un atelier spécialisé composé de maîtres artisans de Dior. C'est ici, dans la région centrale de la Toscane en Italie, à quelques minutes en voiture de la ville de Florence, que, en plus des commandes ponctuelles sur mesure, l'équipe termine tous les prototypes de sacs de la marque. Une fois mis au point, les prototypes sont envoyés dans le réseau d'ateliers Dior pour lancer la production en série.
Aujourd'hui, l'équipe - ici, tous les membres du personnel sont vêtus de blouses blanches immaculées - s'affairent à confectionner un certain nombre de Lady Diors. La collection Croisière 2020 de Chiuri à Marrakech comprenait des designs façonnés à partir d'un nouveau motif de toile du jouy imaginé par Uniwax, dont le siège est en Côte d'Ivoire ; un Lady Dior assorti est orné d'un fier gros chat rendu en cornaline et broderie de perles blanches et placé sur une scène de jungle impressionniste. L'équipe me dit que dans une ode aux techniques nord-africaines, la scène complexe est brodée à l'aide de fils de pur coton traditionnels au lieu d'un mélange plus moderne de coton et de nylon. Ici, le souci du détail est clairement primordial.
A proximité, une étagère en métal gris contient des prototypes du travail de Marguerite Humeau pour Dior. Pour le quatrième volet de Lady Dior, l'artiste française a fait des recherches sur la biologie et la paléontologie ; le résultat est une version entièrement blanche en forme de nuage de la Lady Dior, formée à partir d'un composé organique solide à l'aide de techniques d'impression 3D. Les possibilités qui découlent de cette collaboration sont ce qui m'impressionne le plus, me dit l'artiste multimédia sud-africaine Athi-Patra Ruga. J'ai été très impressionné par [leur] capacité à traduire les éléments sculpturaux et l'artisanat qui en sont venus à signifier mon propre studio.
Invité par Dior à présenter son point de vue sur la Lady Dior, Ruga a rédigé deux modèles. L'un est précédé d'un autoportrait brodé de l'artiste en perles blanches brillantes, serti de fleurs et de perles en métal irisé. Avec sa deuxième itération du classique, Ruga a rendu hommage à la robe de bal Junon de Christian Dior de 1949, faisant référence à la jupe festonnée à plusieurs couches de la robe avec un patchwork ondulant en forme de vague.
Sur le site de Florence, la réalisation de modèles tels que celui de Ruga commence par la création de modèles, où un maquettiste traduit un croquis en un plan technique. Ensuite, les matériaux sont sélectionnés pour s'adapter aux modèles individuels. Le cuir nappa – la peau luxueuse est une spécialité de Dior – est difficile à travailler en raison de son mouvement lors de la couture. Les cuirs choisis sont ensuite découpés selon le patron. Travaillant sur de longs établis, les artisans découpent uniquement dans la partie centrale de chaque peau, pour obtenir la meilleure qualité de matière première.
Avant qu'un artisan ne rassemble tous les composants d'un sac, les segments individuels sont finis pour concevoir, avec un traitement de surface comprenant des broderies et des impressions. Le sac prend alors lentement forme sur un support en bois massif construit par un groupe externe d'artisans du bois spécialisés. Des ensembles de poignées sont construits en enveloppant un rembourrage spongieux formé à partir d'un composé de cuir résiduel dans un cuir coupé avec précision, qui est ensuite cousu à la main.
Toute nouvelle recrue dans les ateliers toscans de Dior doit avoir la main ferme. En plus de la couture à la main, l'une des dernières étapes de la production consiste à colorer les bords minces où deux morceaux de cuir ont été assemblés. Je regarde un artisan pointer une petite goutte de peinture acrylique bleu encre, qui est ensuite dispersée en poussant la teinture le long de la couture à l'aide d'un outil en bois.
A proximité, le cuir est estampé d'une inscription en métal orthographiée 'Christian Dior'. La marque réserve des tons métalliques particuliers pour chacun de ses sacs les plus vendus : le Lady Dior est estampé principalement avec des lettres en or blanc, tandis que le tampon du sac Saddle est rendu en or antique. Enfin, chaque Lady Dior est décorée d'un quatuor de breloques en métal, chacune orthographiant « Dior » pour couronner le sac préféré de la princesse.
